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>>Valves Melody : droit au coeur !

Placement de la valve Melody

Naître avec une anomalie congénitale impliquant une valve pulmonaire n'empêche pas de mener une vie normale. Mais de multiples chirurgies à cœur ouvert sont souvent nécessaires. La pose percutanée de valves Melody permet de réduire le nombre de ces opérations.

En Belgique, environ 1.000 enfants naissent chaque année avec une malformation cardiaque. 100 à 150 d'entre eux auront besoin d'une opération au niveau de l'artère et de la valve pulmonaires... L'artère pulmonaire joue un rôle clé dans le mécanisme cardiaque. C'est par elle que le sang transite du ventricule droit vers les poumons, où il va se recharger en oxygène avant de passer dans les différents organes. La valve pulmonaire est en quelque sorte la petite "porte" du cœur qui va permettre le passage du sang vers cette artère – et de là vers les poumons. Mais il arrive que cette valve et/ou l'artère pulmonaire soit défaillante ou absente. C'est le cas dans l'atrésie pulmonaire, la sténose pulmonaire ou encore la tétralogie de Fallot.
Dans ce cas, le sang ne peut passer correctement dans les poumons, ce qui met en péril la vie du patient.

Une chirurgie fréquente

Lorsqu'un enfant naît avec une anomalie cardiaque de ce type, une intervention chirurgicale est nécessaire. Un conduit contenant une valve est placé dans le cœur, afin de permettre le passage du sang vers les poumons. Ces opérations donnent généralement de très bons résultats. Néanmoins, au fil du temps, ce conduit peut se rétrécir (sténose) ou s'endommager (fuite), ce qui implique de poser une nouvelle valve. Chez les enfants, la valve initiale devient rapidement trop petite, en raison de la croissance. "Ce type de conduit ne grandit pas avec l'enfant. Si un enfant est opéré juste après sa naissance, il devra au moins subir une intervention avant ses dix ans et une autre vers la fin de l'adolescence. En moyenne, de la naissance à ses 18 ans, il subit trois interventions", expliquent les docteurs Hugues Dessy et Sophie Milani, cardiologues de l'HUDERF.

Une technique non invasive

Or, ces opérations sont très délicates. Quand on ouvre un thorax pour la deuxième ou troisième fois, les organes ne sont plus correctement individualisés.
C'est comme une cicatrice, un amat de fibres, dans lequel il est difficile de distinguer les différentes structures. "Dans les malformations cardiaques, le conduit pulmonaire se trouve souvent juste à côté du sternum et il y a donc un risque hémorragique très important lorsqu'on rouvre la cage thoracique", souligne le Dr Dessy. Pour éviter de répéter ces traumatisantes interventions chirurgicales, une nouvelle technique – l'implantation percutanée (au travers de la peau, sans ouverture chirurgicale) de valves Melody – a été mise au point. Au sein de l'HUDERF, le Dr Dessy et le Dr Milani maîtrisent déjà à merveille cette approche.

Cathétérisme

Melody en Belgique

Lancée en 2003, la pose de valves Melody est remboursée en Belgique depuis juillet 2010. À l'heure actuelle, elle est réservée à 4 centres (KUL, UZ Gent, UCL et HUDERF). "L'Inami a établi un moratoire de trois ans, durant lesquels 40 prothèses par an, soit 10 par centre, pourront être posées. Après cette période, et si un réel bénéfi ce est constaté, la technique se libéralisera", précise le Dr Dessy.
Malgré son coût (environ 20.000 €), l'implantation percutanée présente de nombreux avantages, parmi lesquels l'absence d'ouverture thoracique et une hospitalisation de seulement 3 à 4 jours.

L'intervention par cathétérisme

Lors de l'intervention, sous anesthésie générale, le cardiologue introduit un cathéter (fin tuyau) via la veine jugulaire (cou) ou fémorale (aine). Grâce aux techniques d'imagerie médicale qui permettent de guider le cathéter à travers les vaisseaux sanguins du patient, il peut alors amener la valve (d'origine bovine) jusqu'à destination. Cette valve est attachée à un stent, sorte de petit ressort métallique que l'on va agrandir grâce à un ballonnet, afin qu'il s'immobilise à l'intérieur du conduit pulmonaire.
Grâce à ce stent, la valve est fixée au bon endroit. Le ballonnet est alors dégonflé et le dispositif d'introduction retiré. Le patient peut généralement sortir le surlendemain de l'intervention.

Un avenir prometteur

L'implantation percutanée de valves Melody ne remplace pas la chirurgie.
Celle-ci reste nécessaire lorsqu'un conduit pulmonaire doit être implanté pour la première fois chez un bébé souffrant d'une malformation cardiaque.
Mais la technique permet de remplacer plus aisément une valve abîmée ou trop petite. "Une fois que la valve Melody d'un patient devenu adulte deviendra défectueuse, sa prise en charge sera organisée au CHU Brugmann par le Dr Marielle Morrissens. Toutefois, ce sera l'équipe de cardiologie de l'HUDERF qui se chargera de remplacer la valve", explique Hugues Dessy. Grâce à cette technique, l'échéance d'une nouvelle opération à cœur ouvert peut être reculée. Une véritable aubaine pour les patients, tant sur le plan physique que psychologique.
Comme de nombreuses techniques non invasives, Melody a certainement de beaux jours devant elle.

:: Quelques chiffres ::
>Environ 220 enfants souffrant de malformations cardiaques sont opérés à l'HUDERF chaque année, dont 20 reçoivent un conduit entre le ventricule droit et les artères pulmonaires.
>Environ 2.000 valves Melody ont déjà été posées dans le monde, dont 35 en Belgique et 9 à l'HUDERF.
:: Valve de boeuf ? :: Les valves utilisées en chirurgie cardiaque comme en cathétérisme (valves Melody) sont d'origine bovine. Pourquoi ?
>Pour des raisons de disponibilité : dans nos sociétés, la filière bovine, destinée à l'alimentation, est très importante.
>Pour des raisons anatomiques : la valve de bœuf est particulièrement continente (elle "ferme" bien). Prélevée chez des bœufs de divers âges et poids, elle a juste la bonne taille. Une valve de poule serait, par exemple, bien trop petite !

Auteur : Julie Luong
Source : Osiris News (n° 23, juin-août 2011)

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